L’équipe de Dakar Musique s’est déplacée du coté de Rufisque pour aller à la rencontre d’une figure emblématique du mouvement hip hop sénégalais. Il s’agit d’Amadou Aw AKA Maxi Crazy. Il a déjà participé à beaucoup de compilation et a travaillé avec beaucoup de musicien hip hop, world musique etc. Dans cette interview il revient entre autre chose sur sa carrière, son album et sur l’actualité nationale. Entretien.
Dakarmusique.com : que retenez- vous de ces 25 ans de carrière (1988 à 2013) ?
Nous avons passé le tiers de notre vie à faire cette musique. Je retiens que j’ai connu beaucoup de gens à travers cette musique, j’ai connu d’autres pays, d’autres continents toujours grâce à cette musique. J’ai partagé mes idées, mes sentiments, mes émotions toujours grâce à cette musique. Je retiens également que quand on s’amuse avec une chose, cette dernière peut nous amener très très loin. Au début le rap était un phénomène de mode et par la suite il est devenu un job.
Dakarmusique.com : pourquoi êtes vous sans album depuis plus de quatre ans ?
Je fais partie de ceux qu’on appelle des perfectionnistes. En 2003 je suis resté 5 ans avant de sortir Lux Mea Lex. Un album est un condensé de feeling, de vibes et tout ce qui va avec. Un opus ça prend beaucoup de temps ; si on sort un album en l’espace de quelques mois c’est sûr qu’on aura les mêmes vibes sur tous les morceaux et ce n’est vraiment pas intéressant du tout. C’est la raison pour laquelle je prends le temps nécessaire pour bien écrire les textes ; je ne fais pas de remplissage, chaque mot est important dans ce que je fais.
Dakarmusique.com : quelle sera la particularité de cet nouvel opus en perspective?
La particularité c’est que ça va être un album d’un niveau supérieur à Lux Mea Lex qui a remporté le prix du meilleur album en 2008 et qui m’a fait connaitre au grand public. Déjà ça va être international et l’autre particularité aussi c’est qu’il y aura la participation de pointures internationales.
Dakarmusique.com : la musique est elle un métier ou juste une passion ?
On ne peut pas dire que la musique soit un métier au Sénégal parce qu’elle ne nourrit pas du tout son homme. Ceux qui s’en sorte sont juste ceux qui ont eu la chance de se produire sur le plan international. Donc c’est avant tout un passe temps, une passion. Si c’est en Europe ou en Amérique par exemple la musique est un métier. C’est la raison pour laquelle je dis souvent aux jeunes : allez étudier parce que le hip hop a besoin d’économiste, de médecin, d’avocat, de mathématicien etc. Il faut avoir son métier d’abord et être rappeur par la suite.
Dakarmusique.com : qu’est ce qui fait que la musique ne nourrit pas son homme ici au Sénégal ?
Parce qu’elle n’est pas industrialisée, les gens n’achètent pas les CD, on n’a pas la culture de payer pour assister aux concerts. Etc. Nous sommes une petite population et plus de la moitié n’écoute pas du hip hop, la musique n’est pas structurée, les droits d’auteurs ne sont pas protégés, autant de choses qui font que la musique ne peut être qu’une passion.
Dakarmusique.com : pensez- vous que les manageurs des rappeurs font bien leur travail ?
Existe t-il des manageurs dans le mouvement hip hop ? Je vois plutôt des gens avec leurs amis, en fait. Le management ça s’apprend, manager l’artiste c’est le vendre, c’est créé un produit, le propulsé en investissant de l’argent dessus. Le manageur n’est pas celui qui prend de l’argent sur l‘artiste mais plutôt celui qui investit sur ce dernier et le récupère bien plus tard. Les gens se doivent d’apprendre le marketing avant de manager un crew. Le manageur se doit également d’avoir la culture du hip hop parce qu’on ne peut manager un groupe de hip hop sans savoir ce qu’est le hip hop.
Dakarmusique.com : est- ce que Maxi Crazy a un manageur ?
Je suis mon propre manageur (rires).
Dakarmusique.com : Maxi Crazy fait- il de la politique ?
Qu’on le veuille ou pas nous sommes très politique. Du moment qu’on donne notre idée, notre point de vue par rapport à la marche de la société, on fait de la politique. Je ne milite dans aucun parti politique, je ne veux pas attirer le pouvoir si c’est cela la politique mais ma musique est politique. Et comme disait Sartres : « on ne peut pas tirer son épingle du jeu. Serions-nous muets et cois comme des cailloux, notre passivité même serait une action ». On n’est pas passif mais plutôt actif dans un secteur politique.
Dakarmusique.com : Vous étiez avec le candidat du PS Ousmane Tanor Dieng pour les élections présidentielles.
Je n’appartiens pas au PS, je n’ai pas la carte du PS, mais j’ai soutenu le candidat du PS. Le hip hop il est socialiste en fait ; il y avait une multitude de candidat, il y avait Abdoulaye Wade et il fallait qu’on s’implique quelque part. Ma philosophie c’est que lorsqu’on a le privilège de dire aux gens de ne pas voter pour Abdoulaye Wade qu’on ait aussi le courage de leur dire de voter pour un tel autre. Quand on s’engage on le fait à 100%.
Dakarmusique.com : l’actualité c’est la privation de liberté de Karim Wade un ancien ministre. Réflexion.
Je pense que personne n’est au dessus de la loi. Si les gens ont eu assez de preuves pour l’inculper c’est que la machine judiciaire est en marche. Il y a Sarkozy qui a eu le même problème et il n’est pas ancien ministre mais ancien président. Voilà on doit être responsable de ses actes ; il a géré des postes ministériels, il s’est enrichit et il n’a pas su justifier l’origine de ses biens c’est tout naturellement donc qu’il se retrouve entre deux murs en attendant les preuves qui le disculperont.
Dakarmusique.com : quelles sont les projets de Maxi Crazy?
Je travaille sur un album qui devrait sortir vers la fin de l’année. Ce sera un album international qui va sortir auxétats unis d’abord. Nous y travaillons d’arrache pied depuis quatre ans. Je suis en train également d’écrire un recueil de nouvelles et un livre sur l’histoire authentique du hip hop galsen.
Dakarmusique.com : parlez nous un peu plus de ce livre ?
Le livre sur le hip hop galsen va s’appeler Galsen Authentique. Il va relater en quelque sorte l’histoire du hip hop et va partir de la périoded’avantMcLida jusqu’à l’an 2012. Nous avons remarqué que les jeunes ne connaissaient pas la vraie histoire du hip hop sénégalais, beaucoup ne connaissent le hip hop qu’à partir de 1998 et nous, nous sommes allés bien au-delà.
Dakarmusique.com : mot pour la fin.
Oui je vous remercie de vous êtredéplacé jusqu’ici pour faire une interview et je souhaite également beaucoup de succès à dakarmusique.com pour tout ce que vous faites pour le hip hop et pour la musique.
AbdoulayeDiaw, Dakar Musique
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