SIMON BISBI CLAN « J’ai eu beaucoup d’expériences en France »

par | 13 mai 2009 | Interviews

Après avoir vécu en France pendant quelques temps, Simon Bisbi Clan est de retour à sa terre natale. Ce jeune qui a commencé à s’activer dans le mouvement Hip- Hop bien avant son exil à l’autre facette de l’Atlantique dit avoir acquis beaucoup d’expériences en France. A ce jour, Simon a réussi à s’afficher dans l’espace du mouvement Hip- Hop avec quelques réalisations qui font le bonheur du public sénégalais.

Dakar Musique : Qui est Simon ?
Mon nom d’artiste est Simon Bisbi clan. Je suis artiste, rappeur, producteur, directeur artistique du Label Djolof for live Entertainment. Et je suis rentré dans le mouvement Rap depuis 1997-98 avec mon groupe Bisbi Clan. A la base, c’était tout simplement Bisbi et c’est après qu’on a voulu ajouter Clan parce qu’il y avait beaucoup de tendances à l’intérieur. Au départ, on avait pris les trois initiales de Bisbi et que la première lettre qui correspondait à B était Bocar, le I à Ibou et enfin le S à Simon moi-même pour faire Bisbi. Mais après cela, c’était devenu Fatabarak Allahou Bisbi Clan, c’est-à-dire le jour que tout le monde attend et en général les religions révélées l’appellent le jour du jugement dernier ; ce jour de la résurrection qui était beaucoup plus proche des concepts de morceaux qu’on faisait et c’est comme cela que c’est venu.
Par la suite, on a scindé le groupe avec karboy qui chantait et moi qui faisait le Rap à côté. Donc, on a fait pas mal de chemin, on a fait presque beaucoup de scènes collaborés avec bon nombre de groupes de Dakar et tout cela nous a donné un petit nom nous permettant de croire qu’on avait un album alors que ce n’était pas le cas. Et c’est par la suite que je suis parti en France à Bordeaux en 2002 pour revenir ensuite en 2006. Mon premier album a été intitulé Digué Borleu, ce dernier est sorti en 2006 et n’a pas pu avoir beaucoup d’échos dans le milieu underground et au niveau des rappeurs. C’est suite à cela que je suis revenu avec un autre album intitulé Abadane Bagn Katt. Cet album a beaucoup plus d’échos que le premier avec les morceaux qui s’y figurent tels Mbalax Dééna, Baatine Egotrippe qu’on a fait avec Gaston et que le public a beaucoup apprécié. C’est en moment qu’on a décidé de monter un label ici à Dakar avec d’autres confrères et un cousin qui est en Suisse et j’y ai également associé les managers de Bisbi Clan qui étaient là depuis le début comme Makoura Diop, Aziz Gueye et autres.
Dakar Musique : Votre voyage en France a- t- il des rapports avec le Rap?
Non à la base mon voyage en France n’était pas lié au Rap mais à d’autres choses personnelles à savoir les études et cela n’a pas abouti finalement parce qu’il fallait travailler pour envoyer de l’argent à la famille et finalement cela a pris le dessus sur les études mais n’empêche que je faisais du Rap en parallèle et c’est là qu’on a créé le collectif 9- 9 Projet avec des amis comme Docteur ex , Black Keane et autres et qu’est venu le concept Djolof for live également et c’est à partir de cet instant qu’on est venu à Dakar pour créer et ouvrir la structure qu’on a finalement donné le nom de 99 Ricord Djolof For Live Entertainment.
Dakar Musique : D’aucuns disent que le concept 9- 9 renvoie aux 99 noms de Dieu, qu’en est- il de cela ?
Bon, ce sont les Sénégalais qui l’ont donné cette définition mais à la base cela renvoyait au département des étrangers parce qu’en France tout est codé et dès que tu es un étranger, on te donne le chiffre 99, histoire de montrer que tu n’es pas né dans ces régions de France. Donc chaque région à son code par exemple le code de Bordeaux, c’est le 33 et celui de Marseille je crois que c’est le 31. Donc, c’est là qu’est venu le concept 99. Et vue qu’on se sentait un peu marginalisé, on a pris cela comme étiquette.
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Dakar Musique : Peut- on dire qu’il y a une différence entre la facette de Simon avant son voyage et celle d’aujourd’hui ?
En fait, auparavant c’était une seule partie de Bisbi qui était visible et c’était la partie chantée et ma partie à moi était un peu cachée en dehors du morceau Hip- Hop qu’on avait fait découvrir aux gens. Donc à mon retour, l’expérience que j’ai acquise et les nombreuses collaborations que j’ai eue avec d’autres artistes, m’ont amené à imposer un autre style et c’est cela qui fait évoluer l’artiste. C’est au fur et à mesure qu’on voyait cette évolution, et même celle qui existait avant de partir car il y’avait déjà des morceaux qu’on avait fait ici avec Biddew Bou bess, Fafadi, Sen Coumpeu et d’autres artistes. Mais le problème est : ce n’était pas visible à l’époque.
Dakar Musique : Quelles définitions donnez- vous au Rap ?
Pour moi le Rap c’est les textes, les flow c’est-à-dire la technique. C’est comme une construction de maison et que les textes seraient le fondement et après il y a les murs, les fers qui pour moi représentent tout ce qui est musique. Après cela, il faut de l’ornement de la couleur et cela se résume sur la diversité, c’est- à dire d’avoir plusieurs styles et plusieurs façons de dire les choses et de capter le maximum de monde possible. Mais maintenant chacun à sa définition de peace love and harmony que les Américains ont donné à travers Africa Bambata et donc il y a pleines d’autres philosophies dans le Rap mais pour moi c’est d’abord les textes, après le flow, la technique et la musique.
C’est moi qui écris mes textes et après je m’inspire de tout ce qui m’entoure et l’inspiration vient tout seul et elle dépend aussi des humeurs parfois, de la tendance du jour même, des discussions avec les copains et parfois tu peux avoir une idée qui te passe par la tête et immédiatement tu rentres en studio pour composer le morceau.
Dakar Musique : Quelles sont les thèmes que vous abordez ?
Ce qui revient le plus souvent dans mes textes sont les textes spirituels, les textes politiques, l’amour et ensuite le social et il y a aussi des textes purement Rap, Hip- Hop mais ce qui a tendance à revenir dans les albums, ce sont des textes spirituels qui parlent de batine de marifa ainsi de suite.
Dakar Musique : Quels sont les impactes que vos textes créent à l’endroit du public ?
Mais par rapport à cela, ça touche forcément des personnes. Il y a bon nombre de gens qui m’ont dit que c’est à travers mes textes que j’ai commencé à faire des recherches sur la religion, c’est grâce à mes textes que certaines personnes s’intéressent à la religion et d’autres me disent que c’est à cause de mes textes qu’ils ont eu l’envie de se convertir, comme moi, à l’islam. Les textes politiques poussent les gens à être vigilant sur les choses et vont même parfois à changer des mentalités de certains rappeurs. En cela donc tu deviens un exemple et les gens regardent surtout la façon dont tu analyses les choses de la vie.
Dakar Musique : Vos impressions sur le Rap d’aujourd’hui ?
Il y a beaucoup à faire parce que les gens ne font que parler et ils travaillent peu. Par contre, il y a de bons artistes qui travaillent bien, qui écrivent bien et qui font bien ce qu’ils font. Mais la majorité des gens sont dans le milieu parce qu’ils n’ont rien à faire. Il y a d’autres qui entrent dans le Rap sans savoir ce qu’ils veulent. C’est pourquoi on a eu beaucoup de problèmes parce que les média sont de nos jours très accessibles.

Dakar Musique : Vos projets ?
Je prépare un triple album pour créer une compilation et rassembler quelques artistes de la banlieue par des concerts, des tournées scolaires, des clips etc. parce qu’il n y a pas beaucoup de clips faits. On prépare aussi les prochains 72h du Hip- Hop pour rassembler également toute la communauté du mouvement et cela se passe à la place de l’obélisque et au centre Blaise Senghor. Donc il y a pleins de projets et le plus récent c’est l’album Tigrim bi qui doit sortir dans ce mois de juin.

Dakar Musique : Vos derniers mots ?
On s’en félicite et nous vous remercions de nous avoir choisis. C’est aussi une main tendue pour la culture sénégalaise parce que les artistes n’ont rien de plus important que cela. Des structures comme Dakar Musique travaillent et prennent le relais; un travail qu’elles exposent pour tout le monde. Donc, nous vous en remercions fortement en espérant que la culture sénégalaise, la musique et le Hip- Hop en général puissent d’ici à 2 ou à 3 ans prendre un autre volet.
Entretien réalisé par Pape Ousmane Cissé

La Galerie de Simon Bisbi Clan


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Photos Amadou Tidjiane  THIAM

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