Ibou Tall, auteur,compositeur, arrangeur et producteur : « Souvent, il m’arrivait de composer des titres pour Alioune Mbaye Nder. »

par | 6 mars 2014 | Interviews

Ibou Tall est un auteur, compositeur, arrangeur et producteur qui s’est converti à la musique de Louis Armstrong que ce dernier a légué à l’humanité : le jazz. Il a eu à évoluer pendant 7 ans au sein du Setsima Groupe, où il a été chef d’orchestre pour une durée de 5 ans. Avec Nder boy et consort, ils ont produit une dizaine d’albums jusqu’en 2002, année où il s’est envolé pour l’Angleterre. De retour au pays, il était de passage dans les locaux de DAKARMUSIQUE.COM pour confier plusieurs gros points,dont sa conversion au jazz, ses références musicales, à l’attention des fans, des mélomanes et des professionnels de la musique, entretien.

Dakarmusique.com : où en êtes-vous avec votre carrière solo ?
Ma carrière solo, disons Al Hamdoulilah, j’ai maintenant mon groupe de jazz, qui s’appelle Jazz mates, c’est-à-dire copains du jazz ; c’est un groupe que j’ai monté à Bristol, où je vis actuellement en Angleterre. Le groupe est très jeune parce qu’il n’a que 2 ans, du fait que j’ai senti que pour démarrer ma carrière solo, il fallait vraiment que j’ai mon propre groupe, avant, je jouais pour d’autres groupes comme claviste. Je le fais toujours, mais maintenant c’est mon projet, mon groupe de jazz que j’essaie de mettre en avant.

Dakarmusique.com : du mbalax au jazz, comment s’est opérée la transition ?
Quand  j’étais dans le mbalax avec Alioune Mbaye Nder, j’essayer de bosser sur les harmonies. C’est-à-dire que quand les autres jouaient du mbalax pur et dur, moi mon rôle c’était d’intégrer d’autres sonorités dans sa musique, essayé d’ouvrir avec d’autres harmonies, d’autres couleurs etc. c’est ainsi que ça a commencé, puis en 2002 une fois à Bristol, j’ai rencontré d’autres musiciens. Il y a eu une remise à niveau parce que venant du mbalax, et petit à petit nous avons intégré le milieu.

Dakarmusique.com : quels souvenirs gardez-vous du Setsima Groupe ?
J’ai eu à acquérir un capital expérience vraiment considérable au Setsima Groupe. Le 1er album avec ce groupe, c’était « Aduna », puis « Fatélikul Dom », un diapason avec Ambroise Gomis qui fut un succès etc. ça nous a permis de nous exposer à d’autres sonorités, de rencontrer de grands messieurs. Les souvenirs que j’ai du Setsima Groupe, c’est d’avoir eu accès à de grands studios d’enregistrement, et parfois, je dirais même souvent, il m’arrivait de composer des titres pour Alioune Mbaye Nder, de faire des arrangements pour ses morceaux.

Dakarmusique.com : après plusieurs années d’absence, vous voilà de retour, quels regards portez-vous sur l’évolution de la musique sénégalaise ?
Ah ça je vais être honnête avec vous ! Disons qu’il y a trois facteurs qui font que la musique n’est plus ce qu’elle était : le premier, ce sont les chanteurs et les manageurs. Je pense qu’ils sont un peu ennemis de la musique  sénégalaise, je m’explique. Par exemple si le chanteur ne donne pas un bon cachet aux musiciens, s’il ramasse 80% de la recette avec le manageur, et laisse 20% aux musiciens, ils appauvrissent des personnes qui vivent de leur art. Le problème numéro 2, ce sont les musiciens qui ne sont pas solidaires, donc ils sont un peu complices du préjudice qui leur est porté. Le 3e constat, c’est que nous sommes mal protégés, il n’y a pas de projet de loi stipulant par exemple, que le cachet minimum obligatoire pour un musicien est de telle somme.
C’est une proposition sans prétention, il faudrait revoir plusieurs choses dans l’organisation de ma musique sénégalaise.

Dakarmusique.com : quel est le rôle que Adama Faye a joué dans votre formation musicale pour que vous en arrivé à lui dédier une chanson ?
Adama Faye, je le considère et je ne suis pas le seul, comme le père de la musique sénégalaise moderne. Il a joué dans l’orchestre du Super Etoile, il a joué avec Thione Seck, avec Ismaïl Lo ; il a été le maitre à penser de tous les groupes où il a joué. Il est venu avec un système de jeu qui prédomine aujourd’hui dans la musique sénégalaise,le « Marimba ». Moi, mon premier cachet au sein du Setsima Groupe, je l’ai eu à travers ses marimba, et il y a combien de musiciens qui jouent dans des groupes, qui perçoivent leurs cachets grâce à ses marimba ? Moi c’est cela qui m’a marqué, parce qu’après 30 ans, ou plus, c’est le système de Adama Faye qui prédomine.

Dakarmusique.com : un album est en vue ?
Ah ça oui, je ne vais pas vous le cacher, on est entrain de bosser dessus ; mais comme je dis c’est un nouveau style, ou le jazz vu par un sénégalais, donc c’est comme la cuisine, nous allons essayer de faire un bon dosage avant de le sortir. Et le morceau « Call For Adama Faye », c’était juste pour tester ce que va donner l’opus quand il sera sur le marché, et ca était bien perçu Al Hamdoulilah.

Dakarmusique.com : un message à lancer ?
Je voudrais d’abord vous remercier, Dakarmusique.com, pour le super travail que vous faîtes pour la musique sénégalaise, et c’est un plaisir d’être là. Et je salue tous les musiciens, tous les gens qui m’encouragent, que ce soit sur le net ou dans la vie courante.Enfin je sollicite les prières de tout le monde pour pouvoir réaliser la suite de mes projets.

Par Moustapha KORERA, DAKARMUSIQUE.COM
[email protected]

Articles similaires

Oumou Sangaré : « Je chante pour venger ma mère »

Oumou Sangaré : « Je chante pour venger ma mère »

Oumou Sangaré, porte-parole des femmes et business woman accomplie. Un parcours entre modernité et traditions. La rédaction est allée à la rencontre de la grande Oumou Sangaré, à l’occasion de la sortie de son prochain album, Mogoya. La chanteuse malienne a rapidement...