M. Doudou KONARE est un instrumentiste-auteur-compositeur-interprète & arrangeur ; c’est également l’un des hommes de l’ombre ou encore l’un des musiciens plus ou moins en retrait devant les medias, mais qui ont participé à la création de l’identité musicale jazzy, acoustique etc. de l’orchestre Super Diamono ; c’est dans celui-ci qu’il a passé 17 ans de sa carrière musicale. En plus d’être un guitariste reconnu, M. KONARE est un dessinateur autodidacte, qui a en outre décroché sa Licence en Anglais en 1991. Retour sur une entrevue plaisante que M. KONARE a accordé à dakarmusique.com. Entretien.
Dakarmusique.com : quand est-ce que vous vous êtes lancé dans la musique ?
C’est à 15 ans environs que j’ai commencé la musique ; après un passage éphémère dans un petit groupe que j’avais créé, je suis passé par le Keur-Gui, j’ai travaillé avec Kiné LAM, avec Demba DIA, avec Ismaïla LO pour enfin poser bagages au Diamono. J’ai aussi fait beaucoup de productions d’artistes, ça fait en fait 20 ans que je suis dans la musique.
Dakarmusique.com : quels souvenir gardez-vous encore de l’opposition d’autrefois entre le Super Diamono et le Super Etoile ?
Je crois que ce n’est pas le même parcours, ce n’est pas la même histoire, donc il y a beaucoup d’amalgames. Je ne pense pas qu’il y ait eu concurrence dans la mesure où nous les musiciens, nous sommes des collègues, nous avions déjà joué ensemble ; moi et Habib FAYE nous étions dans la même classe au Lycée Blaise DIAGNE et nous nous fréquentions. Il n’y avait pas de concurrence car Omar PENE n’a pas la même histoire que Youssou NDOUR, celui-ci est passé par l’Etoile de Dakar puis il a crée son groupe ; PENE était dans un orchestre, ce qui faisait le charme du Super Diamono c’est que c’était un orchestre. Un orchestre est diffèrent d’un groupe où les gens se rencontre, où le chanteur est comme une sorte de lead ; alors que dans l’orchestre il y a de l’osmose, il y a une sorte de magie qui s’opère entre les musiciens qui sont des amis, des frères qui habitent ensemble et qui grandissent ensemble tel le Super Diamono.
Dakarmusique.com : périodiquement le Super Diamono a changé en Omar PENE & le Super Diamono.
C’est vrai que par la suite il y a eu une tendance qui s’est opérée au Sénégal, les gens ont voulu devenir des chefs de groupe. Au Super Diamono quand t-il y a eu cela, il y a eu une rupture, celle-ci n’a pas été bénéfique au Super Diamono ; à mon avis Omar PENE a hérité du Super Diamono, mais je ne crois pas qu’il en ait fait un trésor, or sur la quasi-totalité des productions actuelles, il les puise de ce trésor en d’autres termes du Super Diamono ancien, même sa carrière acoustique est basée sur le Diamono. Ce patrimoine dont il a hérité, je ne suis pas très sûr qu’il en ait fait une très belle utilisation, parce que quand t-il y a eu cette rupture : Omar PENE & le Super Diamono, ça n’a pas été une évolution positive selon moi. Ramenez tout à soi-même et avoir une attitude plus ou moins égocentrique n’arrange pas les choses, d’autant plus que c’est des gens qui ne sont pas réellement compositeurs, certes ils sont auteurs, mais l’ossature de leur musique est basée sur les musiciens. Ce manque de reconnaissance envers les musiciens ne peut pas continuer, si vous regardez bien beaucoup ont démissionné, des cas comme Jimi MBAYE, Habib FAYE, le bassiste de Fallou DIENG, Dembel a démissionné après moi, je lui avais dit que cette situation ne peut pas perdurer.
Dakarmusique.com : vous dites probablement vrai mais le Super Diamono sans Omar PENE serait-il ce qu’il est ?
En fait il y a une interdépendance ! Il y a une différence entre Michael Jackson et les musiciens qui jouaient pour lui, parce que le concept de Michael c’est lui-même ; c’est diffèrent des Rolling Stones, où si vous enlevez Mik Jagger il y a toujours les Rolling Stones. Pour moi le Super Diamono, ce n’est pas que Omar PENE, il y a Ismaila LO qui a apporté quelque chose au style de l’orchestre, Lapa DIAGNE lui a apporté son beat, Aziz SECK ses percussions, Bob SENE ses innovantes lignes de basse, il y a aussi Adama FAYE qu’on oublie. Je vais vous raconter une anecdote, une fois PENE et moi nous étions dans un train en voyage, nous admirions le paysage, là il m’a dit : « c’est Adama FAYE qui m’a appris à chanter. Il me réveillait la nuit et me disait : ‘’ tu es un paresseux, réveille-toi et chante’’ ». Adama FAYE a crée le Super Diamono, c’est lui qui a crée le concept Super Diamono avec sa marimba, ses influences jazzy et son talent immense.
Dakarmusique.com : l’actualité aussi c’est que vous avez quitté le Super Diamono, quelles sont les raisons qui vous ont poussé à prendre une telle décision ?
A un certain moment de la vie, on fait une introspection, l’on s’aperçoit que l’on doit passer à une autre étape parce que un projet de 17 ans est déraisonnable artistiquement de un ; de deux il y a un constat que j’ai fait, avec Omar PENE nous avions fait un projet acoustique, celui-ci me tenait beaucoup à cœur, car j’y voyais beaucoup de perspectives, mais à un moment donné le projet m’échappait parce que Omar PENE le continuait avec d’autres musiciens. Et si c’est pour rester localement pour jouer au Must, au Just4U etc. et pour le voir aller se produire à l’extérieur avec d’autres musiciens et revenir, je dis que ce n’est pas la peine ; moi, ma carrière je ne là vois ainsi, je là vois plutôt nationale et internationale. Sincèrement je ne peux pas concevoir qu’un chanteur puisse quelles que soient les raisons dire j’ai un guitariste qui a fait 17 ans avec moi, mais quand même je le laisse là pour prendre un autre guitariste que je connais il y a 2 ans. Ce n’est pas logique, artistiquement ce n’est pas logique, et moi je crois que les chanteurs ont un complexe, ils ont le complexe de défendre leur produit et leur identité.
Dakarmusique.com : un message à l’endroit des musiciens ?
Le message que je lance c’est qu’ils soient beaucoup plus solidaires, qu’ils soient plus volontaires, qu’ils montent plus de projets et qu’ils créent des orchestres, de créer une certaine magie parce que justement c’est ça qui fera que la musique continuera à survivre. Il faut également se structurer afin d’avoir un statut clair, mis à part ceux-ci il faut faire de la recherche pour arrêter de jouer qu’un style du fait que la musique est la diversité culturelle.
Par Moustapha KORERA, DAKARMUSIQUE.COM
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