Talla SECK « L’ensemble saabar est composé de sept pièces. »

par | 30 juillet 2009 | Interviews

De son vrai nom Mor Guèye SECK, le percussionniste et leader vocal du groupe « Yoon wi New Look », Talla SECK est un griot appartenant à la grande famille « Diéri-diéri », de la région de Kaolack. Il a mené la révolution de la danse de la lutte traditionnelle sur les fonts baptismaux avec ses deux frères, sous le règne du lutteur Mouhamed NDAO dit Tyson. Il explique à travers cet entretien les éléments qui composent l’ensemble saabar…
 
Dakar Musique : D’où venez-vous, Talla SECK ?
Je suis de la famille de griots «Diéri-diéri » du saloum, autrement dit de Kaolack. Le « Diéri-diéri » est un surnom qui nous vient de notre grand-père Samba Meïssa  Sokhna NIANG. Mes frères Bada, Bakane SECK et moi, avons révolutionné la lutte sénégalaise, avec l’arrivée dans l’arène du lutteur Tyson. En effet, nous lui avons fait la chorégraphie de son écurie et cela a inspiré et inspire encore aujourd’hui les autres lutteurs. Je pense que c’est probablement ce qui illustre mieux les accomplissements  de notre famille, connue notamment pour le saabar (tam-tam).
 
Dakar Musique : Justement, c’est quoi le saabar ?
Le saabar chez moi, c’est une école. Il est constitué de plusieurs éléments : un fût en bois en forme de calice allongé, une peau de chèvre, des chevilles en bois appelées peg, des mêches en coton et des cordes synthétiques plus solides qui servent à tendre la peau pour l’accorder. 
Il s’agit donc d’un ensemble composé de sept éléments au sein duquel chacun joue un rôle spécifique. Lors des cérémonies de baptême, par exemple, il n’est pas rare de voir une dizaine ou trentaine de saabars. Mais le plus important à retenir est les sept instruments qui les composent : le « Nder », le « Thiol », le « Mbeung-mbeung », le « Toungouné », le « Tanbat », le « Gorong-mbabass », et le « Mbeng-mbeung-bal ». Le trio composé du « Nder », du « Thiol » et du « Gorong-mbabass » sont des sabbars dont le fût est fermé à la base. Le « Thiol » est un instrument d’accompagnement au même titre que le « Tanbat », mais c’est aussi lui qui harmonise la mélodie. Quant au « Nder », il est comme le  « chef d’orchestre « , et il ne peut être remplacé que par le « Ngoroung-mbabass » s’il manque lors d’un spectacle : ils ont le même son. Le Nder est aussi le plus allongé et le plus grand des saabars. Pour ce qui est du « Toungouné », on pourrait le comparer à la guitare basse. Il est comme le sel dans un plat de riz au poisson : quasiment indispensable ! Le « Mbeng-mbeng » tient la cadence de l’orchestre. Enfin, il y a le « Mbeung-mbeung-bal », qui fait le « mbalax » même : c’est lui qui fait danser les gens. Et pour parler un peu technique, ce sont les bûcherons qui font la première partie du travail : ils nous livrent le support et nous on fait la finition avec la peau de chèvre. Nous ne le faisons qu’avec la peau de cette dernière car elle est plus légère que de la peau de mouton. Il faut signaler que la meilleure peau reste la « Wata boor ». Celle d’une vielle chèvre est la plus difficile à sécher, néanmoins, elle a le mérite d’être plus résistante : elle peut durer jusqu’à deux ans.

Dakar Musique : Est-ce possible pour un percussionniste de jouer l’ensemble de ces sept instruments?

Oui, c’est tout à fait possible. Moi, je les joue tous. Certains batteurs sont plus polyvalents que d’autres. Nous avons un ami du nom de Grégoire qui est chrétien, donc à la limite qui ne devrait pas faire de saabar. Et pourtant il joue très bien, mieux que beaucoup de percussionnistes. Donc c’est pour vous dire que c’est comme tous les instruments de musique : si on l’apprend on pourra le jouer facilement. Seulement ce n’est pas donné à tout le monde de jouer des sept. C’est comme pour la guitare ou le clavier : on peut jouer l’un et ne rien savoir de l’autre. La défunte mère du percussionniste Thio MBAYE, Adja Da SECK, qui est l’une des sœurs de mon père, jouait du saabar mieux que les hommes, au point que les européens ont fait des reportages sur elle.

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Dakar Musique : Qu’est-ce qu’on trouve de vous sur le marché sénégalais ?
Trois albums et un single. Le premier album intitulé « Mougne » est sorti en 2004, dans cet opus j’exhorte les gens à la persévérance. Puis en 2006, j’ai sorti « Keuleu mew », ou j’exprime ma philosophie de vie, notamment à propos de l’amitié et de la confiance. Egalement en fin 2008, j’ai mis sur le marché l’album « Dieul lène » en hommage à mes fans. Et enfin, je viens de sortir le single « Djim » qui parle de la trahison venant d’un ami.

Dakar Musique : Avez-vous déjà fait des tournées nationales et ou internationales ?
Je n’ai pas encore fait de tournées nationales. En revanche, j’ai déjà circulé sur le plan international. Pas plus tard qu’en février dernier, j’étais en tournée européenne notamment en Espagne, en Italie et en Suède avec mon groupe le « Yoon wi New look ». Le « Yoon wi » (chemin) est pour nous parsemé d’embûches, mais celles-ci sont toujours surmontables à force de persévérance.

Dakar Musique : Actuellement, quels sont vos projets ?
Je prépare activement mon anniversaire, qui sera suivi de la sortie de mon album. Je compte mener une carrière internationale bien que le chemin à parcourir soit encore long – j’en ai conscience. Je remercie mes parents et toutes les familles religieuses du Sénégal, sans oublier mes fans. Je termine sur ce « Yaye maye ma mew ».

Ndèye Mané TOURE

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