Daddy Maky : « je vais arrêter la musique …»

par | 19 mai 2013 | Interviews

Directeur artistique du Djoloff Reggae Festival et artiste Roots, Reggae, Dance Hall et Hip Hop, Maky Sylla plus connu sous le nom de Daddy Maky n’est plus à présenter dans le paysage culturel sénégalais. Son fameux tube NATHALIA, extrait de l’album « Surgit des Décombres » dans les années 1996 avec la formation du V.I.B,  résonne toujours dans les oreilles des mélomanes. Apres 7 années d’absences sur le territoire national, Daddy Maky revient en 2005 avec un album solo « social Living » qui a fait feu de tous les bois avec notamment des titres comme « Rule to Freedom », « Touba » ou encore « Yasser Arafat ». Dans cet entretien accordé à Dakarmusique.com, Daddy Maky fait le bilan du Djoloff Reggae Festival, de la situation actuelle du Reggae, de son avenir musical et de ses projets futurs.

Dakarmusique.com : pourquoi depuis 2005 avec « Social Living » Daddy Maky n’a plus sorti un album ?
Tout simplement parce que ce n’est pas évident de sortir un album dans la mesure où les acheteurs sont de plus en plus rares pour ne pas dire inexistants. Il suffit de rentrer dans une maison pour faire le constat, il n’y a plus de CD, tout le support est numérique. C’est ce qui explique cette longue absence mais rassurez-vous, j’ai un album qui est déjà prêt et dont  la sortie est pour bientôt, peut être vers la fin de l’année.

Dakarmusique.com : quelle sera la couleur de cette album en perspectif ?
L’album va s’appeler « African Héritage » qui pérennise grosso modo  le même état d’esprit, la même rengaine pour que les gens puissent comprendre que malgré toutes les turpitudes et les vicissitudes de la vie, l’espoir est permis parce que l’Afrique est le futur de l’humanité. On dit souvent qu’au cœur de l’incertitude il y a toujours de l’espoir, si fragile soit-il. C’est dure mais les possibilités sont réelles et présentes, tout est à faire chez nous alors qu’en occident tout est déjà fait. Donc c’est ici que nous sommes utiles et pas ailleurs. Cet album sera aussi le dernier de Daddy Maky, je vais arrêter la musique parce que je suis un peu fatigué. C’est un peu un album d’adieu à tous ceux qui m’ont soutenu depuis ces années. Le reggae m’a tout donné et « African Héritage » est à la fois un album Roots, Reggae, Dance hall et Hip Hop avec un son en perspective avec SIMON.

Dakarmusique.com : votre voix est souvent assimilée à celle de BUJU BANTON ! Vous en pensez quoi ?
Oui c’est vrai et c’est tout à fait normal aussi; il fut une époque où il fallait nécessairement avoir un modèle.  DUGGY TEE  par exemple est influencé par la musique de Barrington Levi, chacun allait pomper où il voulait. C’est vrai que j’ai su retrouver ma propre voie bien que le coté BUJU  est resté. BUJU BANTON est un artiste international qui a marqué toute une génération, je ne suis pas le seul, quand on va en France il a marqué  DADDY NUTTEA par exemple qui a même écrit sur son album : « je remercie BUJU BANTON  de m’avoir inspiré ». Je me suis dit : waw,  je ne suis pas le seul alors ! ca fait du mal de le savoir en prison parce que c’est quelqu’un qui a beaucoup fait pour la musique, un artiste extraordinaire. Big up à BUJU et puis surtout free BUJU BANTON, je prie de tout mon cœur pour qu’il recouvre la liberté pour revenir sur scène.  

Dakarmusique.com : comment est né le Djolof Reggae Festival dont vous êtes le directeur artistique ?
J’ai pensé que pour promouvoir la musique reggae auprès du grand public, il nous fallait organiser un rendez-vous annuel. C’est pourquoi j’ai planifié la première édition en 2007 en amenant le reggae man Jamaïcain HIGHER MAN  qui vit à Londres. L’idée était de perpétuer  un festival Reggae, faire en sorte que les férus de Reggae se retrouvent autour de cet idéal et y passer des messages. La première édition avait pour thème « Djoloff  Reggae Festival pour le Panafricanisme », il n’y avait pas seulement de la musique mais aussi une exposition, une conférence sur le panafricanisme etc. c’est fondamental parce que je ne fais pas de la musique pour chanter et danser mais, derrière, il y a toute une philosophie pour faire comprendre à nos frères et sœurs que c’est ici l’avenir et que nous pouvons bien changer les choses à partir de rien.

Dakarmusique.com : rétrospectivement quel bilan général tirez-vous du Djoloff Reggae Festival ?
C’est un bilan positif parce que l’idée était que les gens comprennent qu’il y avait possibilité, pour une fois dans ce pays, de changer de lieu, de faire du Reggae une musique normale et accessible à tous. L’idée également était d’aller au niveau du Grand Théâtre pour accueillir un autre public qui ne peut pas se déplacer au Sound Système. Mais il y a eu des gens qui ont acheté leur ticket et, quand ils se sont rendu compte qu’ils ne pouvaient pas fumer dans la salle, ils sont partis. Je suis désolé que ca se soit passé de la sorte mais voila !

Dakarmusique.com: comment le Reggae pourrait-il se faire davantage de place à coté du Mbalakh et du Hip Hop ?
Aujourd’hui les meilleurs artistes sur la scène sont des reggae men. Il suffit de voir Ombre Zion qui est une véritable bête de scène, Sister Ouly et Timshel Band n’en parlons même pas. Le reggae a de la qualité ce que les autres musiques n’ont pas. Les artistes sont déjà prêts, il suffit d’amener Ombre Zion aux USA ou en France pour un show pour  savoir qu’il est déjà prêt, de même que Dread Maxim et les autres reggae men. Donc nous avons une qualité artistique incontestable, ce qui manque ce sont les mesures d’accompagnement.

Dakarmusique.com : est-ce pour dire que vous êtes optimiste quant à l’avenir du Reggae au Sénégal ?
Oui je suis optimiste il y a énormément de jeunes talents qui ont tout pour réussir. Il faut juste qu’ils fassent attention, qu’ils restent clean en évitant les clichés pour que les gens aient envies de venir vers eux. De toute façon le talent est là ce qui manque c’est les partenaires. Il faut faire en sorte que le sponsor puisse invertir dans le reggae sans que son  image ne soit ternie.

Dakarmusique.com : quels sont les projets ?
Je prépare un autre événement à savoir la nuit du reggae et je communiquerai sur l’événement une fois la date fixée. Mais ce sera toujours le même style et on va faire en sorte que ceux qui ont choisi le reggae puissent s’exprimer comme le font les ivoiriens, les guinéens et les maliens.

Dakarmusique.com : votre dernier mot !
Je n’ai aucune prétention sinon d’être un  acteur culturel, un artiste qui aime son pays, son continent, et qui veut apporter sa pierre à l’édifice. J’espère que les gens comprendront ma démarche et l’appuieront.

Par Abdoulaye Diaw, Dakar Musique
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